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5 facettes pour construire un dispositif hybride : du concret !

Après une introduction à la notion de dispositif hybride pour enseigner et apprendre, nous donnons quelques conseils concrets (point 5)  « pour enseigner et pour favoriser l’apprentissage en ligne » basés sur les 5 facettes de « notre » modèle pragmatique d’apprentissage (Lebrun, 2005). J’illustre ce modèle dans un autre billet « J’enseigne moins, ils apprennent mieux« .

1. Un dispositif hybride, qu’est-ce que c’est ?

Le mot « dispositif » est fréquemment utilisé dans la littérature et ce dans différents domaines : appareillage sophistiqué, stratégie militaire, campagne de presse … Nous entendons par dispositif un ensemble cohérent constitué de ressources, de stratégies, de méthodes et d’acteurs interagissant dans un contexte donné pour atteindre un but. Le but du dispositif pédagogique est de faire apprendre quelque chose à quelqu’un ou mieux (peut-on faire apprendre ?) de permettre à « quelqu’un » d’apprendre « quelque chose » (Lebrun, 2005).

En ce qui concerne l’hybridation, nous la considérons comme un mélange fertile et en proportions variables de différentes modalités de formation, en présentiel et à distance (Charlier, Deschryver et Peraya, 2006) mais aussi entre des postures d’enseignement transmissif (l’enseignement au sens strict n’exige plus la présence physique en un temps et un lieu donnés, mais peut sortir de l’ex-cathedra pour atteindre l’étudiant où il se trouve) et des postures davantage liées à l’accompagnement de l’apprentissage. Les dispositifs hybrides que nous considérons ici sont ainsi supportés par une plateforme technologique (un rassemblement d’outils) et leur caractère hybride provient d’une modification de leurs constituants (ressources, stratégies, méthodes, acteurs et finalités) par une recombinaison des temps et des lieux d’enseignement et d’apprentissage : il s’agit donc bien d’un continuum dont une dimension est liée au rapport présence-distance et une autre au rapport « enseigner »-« apprendre ». On trouvera une intéressante typologie des dispositifs hybrides dans l’article de Burton et al. (2011), un fruit de la recherche Hy-SUP à laquelle nous participons.

Cette définition de dispositif contient implicitement la nécessaire cohérence entre les fins (les objectifs, les compétences …) et les moyens (ressources, outils, méthodes) ainsi que la validation de l’atteinte par les apprenants des objectifs (l’évaluation) et la validation des moyens mis en place.

2. Un dispositif pour enseigner ?

Nous sommes ainsi très proche d’une définition de l’enseignement donnée par Brown et Atkins (1988) : L’enseignement peut être regardé comme la mise à disposition de l’étudiant d’occasions où il puisse apprendre. C’est un processus interactif et une activité intentionnelle. Les buts […] peuvent être des gains dans les connaissances, un approfondissement de la compréhension, le développement de compétences en “résolution de problèmes” ou encore des changements dans les perceptions, les attitudes, les valeurs et le comportement (p. 2).

3. Un dispositif pour apprendre ?

Continuons notre cheminement : un dispositif d’enseignement (ce que l’enseignant va proposer ou faire), un dispositif pour favoriser l’apprentissage (ce que l’étudiant va construire), comment associer les deux ? Si enseigner revient à favoriser l’apprentissage, à donner à l’apprenant des occasions d’apprendre, quels sont les leviers à disposition de l’enseignant ?

Pour répondre à cette question, nous avons confronté des objectifs généraux de l’éducation (en particulier, les compétences dites transversales), les méthodes pédagogiques (en particulier, celles proches des nécessaires activités et interactivités de l’étudiant) et les potentiels des outils technologiques. De cette étude (Lebrun, 2007), sont sortis différents « facteurs d’apprentissage » réunis dans un modèle pragmatique d’apprentissage.

Facettes du processus de l’apprentissage Description de la facette
Information
Les ressources, les connaissances et de leurs supports
Motivation Les éléments du contexte qui donne du sens et de l’environnement didactique pour favoriser l’engagement
Activité Les activités relatives à l’appropriation et au développement des compétences de plus haut niveau (analyse, synthèse, évaluation, sens critique …)
Interaction L’interactivité des diverses ressources et surtout les interactions entre les acteurs, étudiants et enseignants
Production Les acquis de l’apprentissage et leurs signes, la construction personnelle ou collective …

La figure ci-dessous présente une vue dynamique de cette approche caricaturale mais pragmatique du processus d’apprentissage sur laquelle prendra appui la construction du dispositif pédagogique : les contextes, les ressources, les méthodes génératrices d’activité, les acteurs et leurs rôles, les tâches, les productions. Un dispositif (des méthodes …) sans plan, sans carte (le modèle proposé) risque de conduire à l’errance pédagogique !

4. Questions pour agir sur les cinq facettes de l’apprentissage

Nous rassemblons ci-dessous quelques considérations qui nous semblent importantes lorsqu’on souhaite construire un dispositif pédagogique « autour » d’une plate-forme Internet comme iCampus :

Informations : qu’en est-il aussi de l’information proposée comme substrat à l’apprentissage? Sa source est-elle uniquement dans le discours de l’enseignant ou alors la porte est-elle ouverte à l’information apportée par l’étudiant qui consulte revues, livres, encyclopédies … qui cherche lui-même dans la bibliothèque, dans les cédéroms?

Motivations : le contexte (au niveau du contenu et du dispositif) est-il suffisamment élucidé pour qu’un apprentissage de qualité puisse prendre place et pour que les connaissances présentées ou à découvrir fassent sens pour l’apprenant?

Activités : quels sont les outils (grilles d’analyse, démarches expérimentales, protocoles d’évaluation …) mis à la disposition de l’apprenant pour qu’il puisse construire de nouvelles connaissances et de nouvelles compétences transférables et validées au travers des activités proposées?

Interactions : les «moments» du dispositif sont-ils bien balancés entre des périodes de travail collectif, travail individuel et travail de synthèse par l’enseignant?

Productions : Sait-on finalement à quoi on doit arriver, ce que l’on doit produire, dans quelles conditions … quels sont les signes de l’apprentissage effectué?

5. Du concret pour meubler le dispositif

Informer

De manière générale, lorsqu’on parle du « savoir », on imagine bien souvent une encyclopédie bien pleine. Malgré les taxonomies, le savoir, au sens large, est bien vite réduit à la connaissance, la connaissance est bien vite réduite à l’information. La société de l’information est vite devenue société de la connaissance, la société de la connaissance est vite assimilée à un apprentissage facile, généralisé … grâce à l’apprentissage « électrique », l’eLearning. Pourtant, Montaigne déjà, nous l’avait bien dit: l’étudiant n’est pas un vase à remplir mais un feu à attiser.

  • Informer aussi sur le dispositif
  • Donner les objectifs, préciser les critères à satisfaire…
  • Illustrer le contexte qui donnera du sens à l’apprentissage souhaité
  • Montrer le chemin à accomplir au travers des connaissances et compétences à construire
  • Donner des outils de reconnaissance des (de ses) compétences
  • Privilégier une granularité faible aux « documents »
  • Fournir des références Web aussi mais pas trop

Motiver

Parmi les facteurs de la motivation (Viau, 1994), nous mettons en avant ceux qui concernent le sens que l’étudiant peut donner aux activités qu’on lui propose: valeur de la tâche, compétences à développer dans l’exercice de la tâche, contrôle qu’il peut avoir sur le déroulement de l’activité. Il s’agit de rassurer les étudiants et aussi de contextualiser les apprentissages, c’est-à-dire de les rendre davantage proches des réalités de la vie quotidienne et professionnelle.

  • Souligner les nécessaires connaissances et compétences antérieures
  • Préciser les objectifs (les contenus – savoir et savoir-faire et les méthodes – sources de compétences transversales)
  • Préciser les connaissances et compétences à atteindre
  • Décrire le contexte
  • Préciser les consignes, l’agenda … les balises dans l’espace de liberté pour apprendre
  • Montrer l’intérêt et la valeur de la tâche
  • Préciser les éléments contrôlables (ce qui dépend de l’apprenant) de l’activité
  • Énoncer les éléments de soutien, d’interaction

Activer

Un apprentissage de qualité ne se bâtit pas sur un simple transfert de la matière enseignée mais sur la construction personnelle que l’apprenant va entreprendre. Même si cela fait mal aux technologues, on n’apprend pas en ligne ! On apprend « en soi ». La grosse partie de cette activité échappe quelque part à l’outil technologique et peut être le résultat du dispositif que l’enseignant met en place: à lui revient la décision de faire travailler les étudiants en groupe, de les faire plancher sur un problème, de les engager dans un projet personnel ou collectif … ou de leur « donner cours à l’ancienne » même au travers des nouveaux médias.

  • Scénariser les activités, les étapes
  • Utiliser les informations pour les traiter
  • Fournir des outils de « malaxage » des informations pour construire des connaissances
  • Proposer aussi des activités hors plate-forme
  • Travailler la cohérence des activités
  • Prévoir des activités de reconnaissance des acquis, de réflexivité sur l’action
  • Alterner applications, exercices, problèmes, cas … et apports théoriques ou modélisants
  • Donner des objectifs de production
  • Faire jouer l’apprentissage collaboratif

Interagir

Dans un ouvrage récent consacré à l’apprentissage et à la formation des adultes, Bourgeois et Nizet (1997) reprennent à Cohen la définition de l’apprentissage coopératif. Il s’agit de « faire travailler les apprenants en groupes suffisamment restreints pour que chacun ait la possibilité de participer à une tâche collective qui a été clairement assignée. De plus, les apprenants sont censés réaliser la tâche sans la supervision directe et immédiate de l’enseignant ».

Un apprentissage coopératif suppose donc un travail en groupe, mais tout travail en groupe ne signifie pas nécessairement apprentissage coopératif. Pour qu’on puisse parler d’une tâche coopérative, cette dernière doit être formulée de manière à ce qu’un étudiant seul ne puisse pas la résoudre, c’est-à-dire qu’elle nécessite une réelle coopération entre les membres du groupe. En quelque sorte, il faut qu’il y ait « dépendance » des étudiants les uns par rapport aux autres. De plus, l’enseignant doit explicitement demander et favoriser une coopération entre les étudiants. De manière plus générale, on parle de coopération lorsqu’il y a une « interdépendance positive des buts » (on réalisera ses objectifs si les autres réalisent les leurs également); on parle de compétition lorsqu’il y a « interdépendance négative des buts » (on réalisera ses objectifs si les autres ne les réalisent pas); on parle alors de travail individuel s’il n’y a pas d’interdépendance.

  • Choisir les tâches adéquates, des tâches authentiques
  • Renforcer l’interdépendance, j’y arrive si les autres y arrivent aussi !
  • Favoriser l’émergence de points de vue différents
  • Donner les occasions d’exercer l’esprit critique
  • Prévoir les feed-back aux étudiants
  • Réfléchir aux différentes formes de tutorat (technique, cognitif, affectif, métacognitif …)
  • Balancer correctement les éléments personnels et collectifs
  • Equilibrer flexibilité et contrainte
  • Profiter du passage exigent par l’écrit
  • Favoriser tout à la fois la pensée divergente (analyse) et la pensée convergente (synthèse)

Produire

L’ordinateur est avant tout un outil, un outil de production. Outil pour enseigner, outil pour apprendre mais aussi un outil qui permet à l’apprenant de construire les traces d’un apprentissage qui a eu lieu. L’apprenti du Moyen-Âge construisait déjà son chef d’œuvre, l’objet qui prouvait son savoir-faire. Une motivation importante des étudiants de ce début du troisième millénaire, dans l’apprentissage sur Internet, est de « faire œuvre dans un espace public ».

  • Produire des connaissances nouvelles …
  • Produire un objet, un travail, un « signe » de l’apprentissage réalisé, un chef d’oeuvre …
  • Favoriser la présentation, la communication, le partage
  • Confronter l’œuvre aux critères
  • Donner des outils de reconnaissance des connaissances et des compétences acquises
  • Soulever les nouvelles questions
  • Lancer un nouvel apprentissage

En route maintenant vers une illustration … encore plus concrète dans un autre billet « J’enseigne moins, ils apprennent mieux ».

Références

Bourgeois, E & Nizet, J (1997). Apprentissage et formation des adultes. Paris : PUF.

Brown, G., & Atkins, M. (1988). Effective Teaching in Higher Education. London : Routledge.

Burton, R. et al. (2011). Vers une typologie des dispositifs hybrides de formation en enseignement supérieur. Distances et savoirs 1(9), pp. 69-96. Disponible sur Internet : http://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2011-1-page-69.htm (Consulté le 19 septembre 2011).

Charlier, B., Deschryver, N., & Peraya, D. (2006). Apprendre en présence et à distance : Une définition des dispositifs hybrides, Distances et savoirs, 4(4), 469-496.

Lebrun, M. (2005). eLearning pour enseigner et apprendre. Allier pédagogie et technologie. Louvain-la-Neuve : Academia-Bruylant.

Lebrun, M. (2007). Théories et méthodes pédagogiques pour enseigner et apprendre : Quelle place pour les TIC dans l’éducation ? 2ème édition revue. De Boeck (Bruxelles), 206 pages.

Viau, R. (1994). La motivation en contexte scolaire. Bruxelles : De Boeck Université.

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